Lors d'une conférence de presse au Press Club Brussels Europe le jeudi 7 juillet 2016, l'ancien prisonnier au Congo, Dr Jean-Pierre Kanku Mukandi a déclaré qu'il avait été libéré le 24 mai 2016 après un procès qui n'a pu prouver sa culpabilité face aux accusations graves portées contre lui.
Le 4 février 2013, Dr Jean-Pierre Kanku, médecin belge d'origine congolaise avait été arrêté à Kinshasa en RD Congo, accusé de fomenter un coup d'état pour renverser monsieur Joseph Kabila. Il avait ensuite été présenté à la télévision comme cela arrive parfois en RD Congo quand le régime croit détenir un gros gibier.
Le procès de Dr Kanku s'ouvre en 2014, est interrompu, puis reprend en janvier 2016.
À l'issue de celui-ci, Jean-Pierre Kanku est acquitté faute de preuves matérielles suffisantes.
Durant sa communication, Dr Kanku a parlé des conditions d'incarcérations inhumaines de la prison militaire de Ndolo: plus de 170 personnes dans une cellule prévue pour 45, bastonnades, coups, traitements inhumains et dégradants dont par exemple celui infligé aux prisonnières : elles étaient obligées de danser nues dans la cour, une danse congolaise à la limite de l'obscénité « Ya Mado ».
S'il ne tenait qu'à lui, Jean-Pïerre Kanku n'aurait pas parlé des conditions carcérales de la prison militaire de Ndolo. Dans sa communication, cela ne prenait même pas un paragraphe. Son exposé était plutôt centré sur son engagement politique à la tête du « Mouvement debout Congolais ».
La presse curieuse, l'a poussé à lâcher par-ci par là quelques confidences. « Pas satisfait », diront certains journalistes à la sortie.
Que retenir de cette conférence de presse ?
Dr Kanku voudrait tourner cette page de sa vie et se projeter dans l'avenir. Malheureusement pour lui, la mobilisation qui avait entouré son arrestation mérite plus d'éclaircissements. Cette arrestation avait-elle été un hasard ? Pourquoi lui et pas un autre ? Voulant s'engager politiquement sur terrain, n'était-il pas tenté de ménager le pouvoir de Kinshasa dont le dégré de méchanceté sautait aux yeux? A cette insinuation il répondra clairement : « Consultez les vidéos qui circulent sur mon procès et vous verrez que je n'avais pas peur d'eux. »
Était-ce un refoulement involontaire ? Une personne le connaissant depuis des années nous confiera à la sortie : « C'est son tempérament, il faut essayer de le faire parler, il parlera ». Certains journalistes ont ainsi assailli Dr Kanku après la conférence afin d'obtenir plus d'informations.
Le peu de confidences lâchées par Dr Kanku sur les conditions inhumaines des prisons congolaises a révolté plus d'une personne dans la salle. L'orateur a même essuyé une larme à un moment de son exposé.
En prison, Dr Kanku avait été très actif : non seulement qu'en tant que médecin il assistait les autres prisonniers, mais il ne s'est jamais avoué vaincu. Il écrivait à toutes les institutions pour réclamer un procès afin de prouver son innocence. Il avait eu son procès.
Ajouter à cela la pression extérieure. Cela aura probablement contribué à ce que Dr Kanku se retrouve enfin libre.
Derrière lui, il a laissé des prisonniers moins chanceux, certains en détention préventive depuis des années. Dont un certain Bagayamukwe, ou Bonemuke.
Chaque semaine dans cette prison militaire surpeuplée de Ndolo, il y a deux ou trois morts, de maladie, de négligence, d'épuisement, d'injustice...Dans l'insouciance quasi-totale des geôliers.
Bruxelles, le 8 juillet 2016
Cheik FITA