Mercredi 26 octobre 2016, lors du sommet des chefs d’État africains de la sous-région des Grands Lacs et de la SADC sur la RD Congo, le Président angolais Edouardo dos Santos a prononcé un discours que le clan Kabila a vite fait d’interpréter au premier degré, au point de sabler le champagne croyant avoir décroché une certaine légitimité internationale à défaut de la légitimité intérieure qui est nulle.
Le clan Kabila a peut-être oublié qu'un Chef d'Etat est avant tout un grand diplomate qui dit souvent publiquement le contraire de ce qu'il pense en réalité.
Pour paraphraser un musicien congolais on peut dire: "Quand le doigt montre la lune, le fou regarde le doigt".
Voici.
À l'opposition congolaise, il a dit :
"Pour ceux qui veulent arriver au pouvoir, il est important de savoir qu'ils peuvent le faire démocratiquement, en respectant la loi et la volonté souveraine des électeurs"
La même idée valant pour tout le monde, ne vaut-elle pas pour Kabila aussi ?
Cela veut dire ceci :
Pour ceux qui sont au pouvoir, « Il est important de savoir qu'être au pouvoir, c'est le faire démocratiquement, en respectant la loi et la volonté souveraine des électeurs ».
Les électeurs, ce ne sont pas seulement ceux de l'hypothétique 2018, c'est également ceux de 2011 qui attendaient et attendent 2016!
C'est un rappel poli du respect de la loi, de la constitution qui dit : deux mandats, stop.
C'est également un rappel tout aussi poli de ce que veut le souverain primaire.
Qu'attend le souverain primaire, que veut-il ?
La convocation du corps électoral 90 jours avant la fin du mandat, l'élection présidentielle, puis la passation de pouvoir. Un point, un trait.
Quant aux termes « chemins incertains de la violence » auxquels fait allusion le Président angolais, au stade actuel de la politique congolaise, l'opposition fait des meetings et des marches de protestation. D'où viennent les « chemins incertains de la violence » ? Des gens du pouvoir. Ce sont les gens du pouvoir qui empruntent les « chemins incertains de la violence » ce sont les gens du pouvoir qui espèrent se maintenir au-delà du 19 décembre par les « chemins incertains de la violence », si le peuple souverain applique l'article 64 de la constitution !
À propos des élections que l'opposition devrait attendre quelques mois de plus afin qu'elles soient « dans de bonnes conditions de sécurité et de tranquillité », en bon diplomate, Edouardo Dos Santos voulait faire passer le message suivant à Joseph Kabila : « Au lendemain de la prestation de serment pour le deuxième et dernier mandat, la CENI avait cinq ans pour organiser la présidentielle dans de bonnes conditions de sécurité et de tranquillité ».
Autrement dit, l'opposition n'a pas à attendre quelques mois, elle a déjà attendu 5 fois douze mois soit 60 mois.
Ainsi,loin d'être une prime à la violation de la constitution, à la mauvaise foi, à l'incompétence et à la corruption, le discours de Dos Santos devrait interpeller monsieur Joseph Kabila sur le respect strict de la constitution, et la volonté réelle du souverain primaire, d'ici le 19 décembre 2016 à minuit.
Dos Santos a peut-être dit du mal de l'opposition congolaise, mais ce proverbe congolais mérite attention: "Quand quelqu'un insulte votre enfant en votre présence, c'est en réalité vous qu'il insulte".
Bruxelles, le 27 octobre 2016
Cheik FITA