Atmosphère de tristesse voire de révolte, ce mercredi 9 juillet 2008 à l’église Saint Boniface de Bruxelles,
dans le quartier Matonge lors de la célébration de la messe en mémoire de Daniel Botethi Loleke, ce jeune député du MLC, sauvagement assassiné à Kinshasa.
Plus d’une centaine de personnes ont spontanément répondu à l’invitation de la famille du défunt ainsi qu’à celle du MLC, son parti, pour cette messe célébrée par l’abbé Gilbert YAMBA, entre 18h30 et 20h00.
Dans l’assistance, on a pu remarquer la présence de l’épouse du sénateur Bemba, du député MLC Albert M’PETI, de Gérard TUMBA, ancien ministre du plan, de Bienvenu Boyembe, conseiller chargé du contrôle parlementaire au cabinet du président, du général Eluki et de bien d’autres personnalités congolaises.
Que ce soit dans l’homélie du célébrant du jour, dans le message de Docteur Mbungani représentant du MLC au Benelux ou même dans les différentes conversations que nous avons interceptées, une constante apparaît : Nous sommes en présence d’un nième assassinat politique depuis la fameuse « libération » de mai 1997. Si pas commandité par le pouvoir en place, mais en tous les cas, dont la majorité présidentielle congolaise est responsable : par désarticulation du système ou par émergence d’une aile jusqu’au-boutiste.
Pourquoi cet acharnement contre un parti d’opposition ? Le meurtre est-il une arme politique ? La balle et le fusil sont-ils des arguments ? Si oui, est-ce pour confirmer le caractère démocratique du régime ou pour sous-entendre une dérive totalitaire si pas fasciste ?
Dans les pays occidentaux où nous sommes, la vie humaine a une valeur incommensurable. Pour la disparition d’un bébé durant quelques heures seulement, que ne voit-on pas : mobilisation des médias et de différents services publics, interpellation des exécutifs. Des têtes tombent et pas des moindres. Parfois, des gouvernements passent à la trappe avec à la clé des élections anticipées ! Oui quand on a pris la décision de diriger la cité, on est responsable de la vie, de la sécurité, du bien-être des citoyens, de tous les citoyens. Et en cas de failles, on doit en répondre devant la Nation. Et pour l’honneur, il est même souhaitable de rendre le tablier. Sinon, ne vaut-il pas mieux s’abstenir de briguer de grands postes de responsabilité ?
Ne nous voilons pas la face : l’assassinat du député du MLC est un fait gravissime ! S’il n’est qu’une bavure ou l’œuvre de ce qu’on a coutume d’appeler depuis le temps du pati-Etat « éléments incontrôlés », le gouvernement tant provincial que central, certains de leur innocence, ne devraient-ils pas demander la confiance du peuple par des élections anticipées ? En cas de victoire, les actuels animateurs en sortiraient grandis. Ne pas oser un tel saut les rendrait suspects.
L’immense foule avec ses quolibets contre le pouvoir, et qui a accompagné le défunt à sa dernière demeure, n’interpelle-t-elle pas ?
Oui, ce n’est pas un bébé qui a disparu, c’est un élu du peuple qui a été abattu en pleine capitale. Jeune, intelligent, ayant tout l’avenir devant lui, vice-président du parlement de la mégapole Kinshasa, un modèle pour de millions d’autres jeunes.
Si c’est le système qui en a décidé ainsi de lui, à fortiori, le citoyen anonyme au fin fond de nos villages, n’est-il pas dix mille fois plus en danger ?
Organiser un procès à la va-vite sous une véranda croulante d’une caserne du temps colonial est-ce assez ? Faire payer des lampistes est-ce suffisant ?
Pire, cela ne donnerait-il pas l’impression qu’on se cramponne au pouvoir pour le pouvoir ? Ou pour des intérêts personnels ?
À moins d’accepter ceci : Le Congo est une république bananière ! Le peuple et l’opinion devraient alors en prendre acte.
Les partis de l’opposition ont décidé de suspendre leur participation aux institutions. Ne devraient-ils pas pousser leur logique jusqu’au bout en réclamant la démission de tous les animateurs actuels, pour l’organisation des élections anticipées ?
Juin 2006-juin 2008, nous nous dirigeons vers la mi-parcours du quinquennat issu des dernières élections tant vantées. N’est-ce pas une durée suffisante pour estimer la capacité ou l’incapacité d’un pouvoir ? Que peut-on faire durant le temps qui reste qu’on aura pas pu depuis les élections ?
Pouvons-nous oser lancer le double défi suivant:
a) A la nébuleuse Kabiliste : de démissionner en bloc et organiser des élections anticipées et confirmer ainsi son ancrage dans la population
b) Au conglomérat de l’opposition : de ne plus rentrer dans les institutions et exiger des élections anticipées.
Si les uns et les autres se débinent, si le pouvoir traîne les pieds et que l’opposition fait marche arrière, quelle conclusion le peuple devra en tirer ?
Et aux élections de 2011, ne devra-t-on pas sanctionner sévèrement tous ceux qui se seront nourris directement ou indirectement aux mamelles du trésor public durant cinq ans via véhicules 4x4, frais de missions à l’étranger, salaires et émoluments plantureux?
Cheik FITA
Bruxelles, le 11 juillet 2008