Il est difficile de parler et de penser développement sans associer l’Homme, acteur et destinataire. Quelle est l’approche et la pratique de la BAD Banque Africaine de Développement d’un côté, de la coopération belge de l’autre ? Et nos pays qui jouissent de cette coopération, quelle est leur part ?
Nous avons profité du passage à Bruxelles du DG de la BAD pour lui poser la question. C’était lors d’un point de presse, le mardi 5 mai 2009 dans le cadre des assises de coopération au développement 2009, au Palais d’Egmont. Thème, la crise financière et l’Afrique.
Pourquoi ces assises ?
Pour Charles Michel, ministre belge de la coopération au développement, le but de ces assises était d’aider les partenaires africains à faire face à cette crise. Les pays ciblés : La RD Congo, la Tanzanie et le Sénégal.
Pour cela, les pays du Nord doivent éviter, le repli sur soi, ils doivent éviter de gratter des économies budgétaires sur le dos de leurs engagements antérieurs vis-à-vis des Etats du Sud.
Dans le cadre des objectifs du millénaire, le ministre belge a souscrit à l’idée d’une interdépendance des objectifs du millénaire pour le développement. Ainsi « on ne pourra pas éduquer un enfant qui a le ventre vide, on ne pourra pas mettre des programmes de santé efficaces si les programmes d’accès à l’eau et à l’assainissement ne sont pas résolus. ».
Pour Donald Kaberuka Directeur Général de la BAD, il sied de tirer les leçons :
- Des politiques populistes
- Des réformes économiques
- Et de l’intégration régionale
Dans le court terme, il faut éviter les dégâts macro-économiques comme l’inflation. Pour cela, il faut un appui budgétaire de la FMI et de la BAD aux pays faibles.
De continuer : La faiblesse de l’Afrique vient du fait qu’avec ses 53 pays, un petit nombre a plus de 40.000.000 d’habitants. La plupart étant en deçà de 10. La BAD s’est donnée comme mission entre autres, l’intégration économique du continent. Mais comment cela peut-il être facile avec une multitude de monnaies, de frontières, de systèmes judiciaires.
Quand à la RD Congo, le Directeur général de la BAD a dit qu’elle avait un cadre macro-économique faible. La RD Congo doit aussi travailler sur la diversification de son économie en rentabilisant par exemple l’agriculture. Un appui de cent millions de dollars de la BAD est prévu.
La BAD finance pour beaucoup des infrastructures. Toute financière qu’elle soit, la BAD s’occupe du développement. Qui dit développement pense à l’homme. Peut-on penser un saut vers le développement sans une attention aux hommes qui assureront l’usage des infrastructures ?
À notre question de savoir si elle avait même un petit budget pour l’information, la sensibilisation de la population via des actions culturelles, le DG de la Bad nous répondra :
« Le travail que vous citez me parait vraiment un travail national, des institutions locales, nous, nous avons des projets pour renforcer la gouvernance… »
Quelle est l’approche belge ?
Le ministre belge de la coopération au développement nuancera :
« C’est un bel exemple, mais tous les canaux de la coopération ne doivent pas tout faire. Je pense qu’en bonne intelligence, il faut déterminer de quelle manière on peut avoir la valeur ajoutée… »
« Je partage l’idée que la dimension culturelle est une dimension qui doit être présente et qui peut jouer un rôle moteur dans le cadre du développement. Si je prends la coopération bilatérale belge à titre d’exemple, nous y sommes particulièrement attentifs à travers des instruments comme Africalia, à travers des initiatives qui visent à utiliser le levier culturel pour porter un message sur le sens que l’on veut donner à la coopération au développement…. Et pas plus tard qu’il y a quelques semaines, étaient réunis ici plusieurs dizaines de représentants du monde entier à l’initiative conjointe de l’Union européenne et du gouvernement belge pour associer culture et développement. C’était une des premières initiatives mondiales du genre, qui a connu un succès important puisque la représentation à haut niveau était à la hauteur des espérances que nous avions… »
Moralité ?
La coopération bilatérale, Les institutions financières internationales comme le FMI, la Banque Mondiale et la BAD décaissent des centaines des millions pour des projets de développement dans nos pays subsahariens. Des sommes qui, logiquement auraient permis des résultats plus visibles.
Le problème ? C’est des choses qui se passent en haute sphère et auxquelles le commun des citoyens ne comprend pas grand-chose.
Il y a ainsi risque d’assister pour longtemps à ce genre de spectacle :
- Des ménagères qui utilisent les caniveaux même neufs, comme dépotoir,
- Des paysans à vélo lourdement chargé tentant de traverser une autoroute afin de rejoindre le village d’à côté.
Pourquoi ?
A défaut de mettre sur leurs comptes l’action de la mobilisation du capital humain via la culture, nos bailleurs de fonds ne devraient-ils pas ajouter aux préalables de leurs financements, la nécessité pour nos gouvernements de financer le secteur culturel national, outil irremplaçable de l’intériorisation collective de la marche vers le développement.
Cheik FITA
Bruxelles, le 6 mai 2009