Peut-on rêver de travailler au Congo quand on vit en Belgique ?
Peut-on y investir ?
De passage il y a peu à Bruxelles dans le cadre du Bruxelles event, monsieur Claude Nyamugabo, ministre congolais des PME a fait un plaidoyer dans ce sens. Nous avons pu nous procurer son discours de circonstance dont nous vous proposons de larges extraits, élagués des considérations politiques.
SITUATION DE LA RD CONGO
« La République démocratique du Congo est un territoire de 2.345.409 kilomètres carrés.
Chaque fois qu’elle occupe les devant de la scène, je suis bien placé pour le dire, c’est au regard des violations des droits de l’homme qui s’y commettent, disons même qui s’y commettaient jusqu’il y a quelques mois. La partie Est de la R.D.C. a été l’objet cette dernière décennie de violations graves et massives des droits de l’homme, plus particulièrement des atteintes à la vie….
« A la question de savoir si l’on peut revenir vivre en R.D.C., je ne peux que répondre par l’affirmative et ce, sans aucune hésitation. Ce n’est d’ailleurs pas à notre diaspora que je tiendrai ce discours car, comme vous le savez, toute diaspora a une base arrière familiale en terre d’origine et les congolais ne font pas exception à cet égard.
INDEPENDANT EN RD CONGO
« …Si l’on vit en République démocratique du Congo, c’est qu’on peut également y prester soit comme travailleur, soit comme indépendant. Le travail d’indépendant, d’entrepreneur est un travail noble.
En Belgique, selon les informations que j’aie, au moins 9 entreprises sur 10 sont des PME.
Ceci montre comment aucune économie au monde ne peut se passer du travail des entreprises privées ou même des entreprises au sein desquelles l’Etat s’associe aux privés pour satisfaire les besoins de la population.
La République démocratique du Congo est donc respectueuse des standards internationaux relatifs au droit du travail.
Ceux qui s’intéressent au monde des affaires savent très bien que sans les PME, le taux de chômage serait très élevé dans tous les pays du monde. La RDC ne fait pas exception à la règle.
L’Etat seul ne peut donner de l’emploi à tous. C’est une illusion. Il faut que cette tâche de la création du travail soit partagée entre l’Etat et les entrepreneurs privés.
Beaucoup de choses restent bien évidemment à améliorer dans ce domaine comme par exemple la réduction du taux de chômage mais cette question se pose également dans les pays développés.
DE L’ENTREPRENARIAT DES CONGOLAIS VIVANT A L’ETRANGER
« … Les congolais, même vivant à l’extérieur de leur pays, même expatriés restent toujours connectés politiquement et économiquement à leur nation à en croire les investissements qu’ils y réalisent, les transferts de fonds qu’ils y effectuent ; bref les soutiens tous azimuts qu’ils apportent au développement de la RDC.
L’entreprise étant à la fois la source principale de création de richesses nationales et d’emplois et la cellule de base de toute économie industrielle ; elle est également un lieu d’innovation, de promotion et d’épanouissement.
Dans une économie de marché, c’est au niveau de chaque entreprise que s’effectue la plupart des choix qui commandent le développement économique.
4. de l’investissement des Congolais de l’étranger
« Lors des échanges avec mes collègues africains, de l’importance des interventions des nationaux vivant à l’étranger dans l’économie nationale, et surtout dans l’éclosion et le développement des petites et moyennes entreprises.
Les Congolais de l’étranger, bien que faisant déjà beaucoup pour leur patrie, n’ont pas encore tous adopté ce comportement. Et pourtant, aujourd’hui plus que hier, toutes les conditions sont réunies pour travailler et réaliser de bonnes affaires en R.D.C….
« Ne laissez pas les citoyens d’autres nationalités vous voler le droit de l’entreprenariat dans votre pays.
Vous avez, j’insiste, une espèce de droit de préemption, de préférence ou de privilège sur les entrepreneurs du monde entier parce que vous êtes de la maison.
PESANTEUR
Le spectre de la guerre qui avait endeuillé notre pays et noirci son image à l’étranger pendant de nombreuses années est aujourd’hui passé
DE LA RECONSTRUCTION : UN SLOGAN ?
« Ce n’est plus un mythe. A ce jour, même les plus sceptiques d’hier en sont convaincus. C’est du vécu quotidien.
Il y a des transformations évidentes, des bougés incontestables, des déplacements palpables que vous pouvez venir constater sur place.
Le potentiel de croissance qu’impliquent les travaux en cours offre d’énormes possibilités d’emploi dans l’ensemble des secteurs de la vie nationale.
Aujourd’hui plus qu’hier, le Congo a besoin des initiatives privées, des entrepreneurs dignes et sérieux parmi ses propres fils et filles.
L’Etat est maintenant conscient qu’il ne lui est plus possible de tout faire à la fois, qu’il doit non seulement encourager les particuliers à investir dans différents secteurs mais aussi qu’il doit lui-même se désengager dans d’autres pour pouvoir s’associer avec des opérateurs privés.
L’ « Etat entrepreneur public » et donc promoteur d’entreprises publiques d’hier se mue désormais en « simple partenaire » et co-associé dans des sociétés commerciales allant même jusqu’à abandonner des secteurs entiers aux concessionnaires privés.
Il suffit d’observer le paysage des sociétés commerciales et des entreprises privées actuelles pour s’en rendre compte.
DE L’ENTREPRENARIAT
« .. En ce qui concerne particulièrement l’entreprenariat, aujourd’hui la R.D.C.offre d’énormes facilités d’investissement.
D’autres intervenants étant chargés du développement particulier de ce point, je m’en vais, pour ma part, en ce qui est des PME, indiquer quelques filières intéressantes, avant d’aborder les aspects de l’accès au financement des projets.
SECTEURS PORTEURS
« …Par principe, chacun est libre de proposer une activité selon ses compétences mais dans le respect de la règlementation en vigueur. L’économie congolaise est une économie libérale.
Nous ne pratiquons donc pas le dirigisme économique en RDC.
Nous laissons les opérateurs libres de proposer ce qu’ils sont capables de faire pour l’amélioration du vécu de nos populations.
« …Je donnerai à titre illustratif l’exemple de la filière dépendante des entreprises de construction et de génie civil, car comme vous le savez, avec les travaux de reconstruction du pays, les opportunités sont nombreuses dans ce secteur, pour trouver du travail, créer des sociétés ou entreprendre des affaires. Ce secteur a besoin de l’expertise que l’on peut trouver parmi les Congolais vivant à l’étranger.
Ensuite, il y a la filière agro-alimentaire et tous les secteurs qui en dépendent. Point n’est besoin de le rappeler ici car en cette matière également, il y a à faire sur l’étendue du territoire national.
Tout dépend des capacités des entrepreneurs.
Et puis il y a les services et je peux ainsi énumérer tous les secteurs de la vie nationale pour vous dire combien travailler et entreprendre vous permet de vivre et rentabiliser vos investissements mieux en R.D.C. que nulle part ailleurs.
Je n’oublie pas non plus les secteurs de la distribution, de la gestion des immondices, de la consommation, du transport, de l’éducation, la publicité, les soins de santé etc.
Les hommes d’affaires savent que le Congo est un « paradis des affaires », les gens ont besoin de presque tout en commençant par les besoins élémentaires ; ils savent que c’est un pays des consommateurs et donc un pays d’avenir.
Si dans les pays développés, il n’y a croissance économique que si la consommation est stimulée, que dire des pays moins développés où les besoins et les demandes de tout genre sont énormes.
ACCES AU FINANCEMENT
« Les difficultés d’accès au financement, aujourd’hui aggravées par la crise financière internationale, que connaissent les PME Congolaises.
En effet, très peu d’hommes d’affaires développent leurs entreprises par des fonds propres. Tous recourent aux banques et autres institutions financières. Les PME plus que les grandes entreprises sont plus confrontées à ce besoin.
Certes, le secteur bancaire et de la microfinance connaît ces derniers temps, surtout à Kinshasa, un essor sans égal, mais les ressources financières demeurent insuffisantes pour les besoins du pays.
Des études sérieuses ont pu démontrer comment la microfinance, développée à l’origine dans les pays du sud comme le Bangladesh, gagne de plus en plus du terrain et a droit de cité même au Nord. Les entrepreneurs peuvent y recourir aussi bien dans la phase de la création, du démarrage que de la croissance de leurs activités.
Il s’agit là d’un secteur dans lequel les initiatives d’investissement sont les bienvenues, toute intervention pouvant résoudre un problème.
La RDC va, avant la fin de cette année, se doter d’une stratégie nationale de la microfinance.
EN CONCLUSION
« …Je me dois ici de féliciter les Congolais vivant à l’étranger qui ont pris exemple sur leurs homologues de l’Afrique Occidentale et ont entrepris d’envoyer des fonds destinés à financer des affaires dans leurs contrées respectives.
C’est un effort que j’encourage, je pense que ceux qui en ont fait l’expérience ne sont pas déçus.
Vivre, travailler et entreprendre en R.D.C. comporte aujourd’hui les mêmes risques prévisibles que partout ailleurs. »
L’approche du ministre congolais des PME est certes pertinente, mais seulement, entre les congolais vivant à l’étranger (non électeurs !)et le pouvoir en place au pays il y a un lourd contentieux, politique essentiellement. Une fois résolu, quel congolais vivant à l’étranger ne sera pas tenté de rentrer au pays ?
« Faites-moi une bonne politique, je vous ferai de bonnes finances. »
Cheik FITA
Bruxelles, le 25 mai 2009