PHOTO. Capture de France 24 la nuit des élections
L’élection présidentielle française du 22 avril 2012 a donné son verdict :
Nicolas Sarkozy le Président sortant arrive en deuxième position, derrière le socialiste François Hollande. Les deux d’affronteront lors d’un second tour le 6 mai 2012, après un débat télévisé
quelques jours plus tôt, le 2 mai.
De cet exercice de démocratie, les Congolais doivent tirer au moins deux
leçons :
La transparence du scrutin et la vérité des urnes.
Le bilan à présenter quand on est le Président sortant, le programme quand on est
le challenger.
En cette deuxième décennie du troisième millénaire, un demi-siècle après notre
indépendance, le monde est devenu un grand village. Toutes les valeurs sont devenues universelles. La RD Congo n’a aucune excuse d’évoluer comme un électron libre.
Ainsi, une élection présidentielle, est une élection présidentielle ou elle ne
l’est pas, que ce soit en France, en RD Congo, ou au Sénégal.
Le citoyen va voter, chaque voix compte et doit être respectée. Comme la France
ce dimanche 22 avril 2012, la RD Congo peut-elle prétendre avoir présenté au monde des résultats crédibles et respectables d’une élection présidentielle ?
Présidentielle Française du dimanche 22 avril
2012.
Des chiffres
Dès 18h00, la RTBF, la télévision belge diffusait les premières estimations. À
cause d’une loi anachronique, les médias français ne donneront leurs chiffres que deux heures plus tard. L’ordre d’arrivée affichant l’opposant socialiste en tête.
En fin de nuit, le ministère français de l’intérieur publiera les chiffres
officiels. La tendance sera confirmée.
Du contenu de la campagne
Ayant accompli son devoir civique, une électrice la soixantaine passée dira
pourquoi elle n’a pas voté pour Sarkozy : « Il a fait trop de conneries. » Le Président sortant n’en mène pas large. La raison ? Son mandat n’a pas été à la hauteur des
attentes.
Oui, le Président sortant est jugé sur son bilan.
Et le challenger ? Il est jugé sur son programme et ses propositions.
Hollande a promis le changement, le message des électeurs semble également clair : ils veulent plus de changements, les chiffres l’attestent : le Président sortant est sévèrement
sanctionné.
Présidentielle congolaise du lundi 28 novembre
2011.
Des chiffres.
Quarante huit heures avant les élections, des bulletins pré-cochés au profit du
candidat Président sortant, circulaient déjà dans la plupart des provinces congolaises. Le jour du scrutin, ce fut pire. Des cargaisons entières de ces bulletins frauduleux pré cochés
« Kabila » étaient saisies un peu partout.
À la fermeture des bureaux de vote, la plupart des chiffres sortis des urnes
donnaient l’opposant Tshisekedi gagnant dans la plupart des provinces.
Mais dès que les résultats de la CENI commencèrent à tomber, ce sera la douche
froide. Des scores staliniens sortis du néant étaient balancés à la figure des citoyens !
Des candidats
Deux candidats majeurs s’étaient affrontés en RD Congo le 28 novembre 2011 :
Monsieur Joseph Kabila, le Président sortant qui avait un bilan à défendre, et monsieur Étienne Tshisekedi qui venait avec une proposition : faire de la RD Congo un état de droit.
Quel pourcentage des Congolais pouvait affirmer être contents du bilan du
Président sortant sur les points suivants les plus basiques:
l’alimentation
la santé
l’eau courante
l’énergie électrique
l’emploi
l’éducation des enfants
le transport
le logement
la sécurité des biens et des personnes…
Quant à l’opposant d’alors, monsieur Étienne Tshisekedi qui venait avec une
objectif : transformer la RD Congo en un état de droit, quel pourcentage des Congolais pouvait adhérer à sa proposition ? Sachant qu’état de droit sous-entend :
plus personne au dessus de la loi , respect de la constitution…
gestion transparente de la caisse de l’état et une redistribution équitable de la
richesse nationale
fin de l’impunité et une justice indépendante
meilleure sécurité des biens et des personnes avec une armée plus motivée,
véritablement républicaine…
Et aujourd’hui ?
Contrairement à la France dont le jeu démocratique a évolué comme sur des
roulettes, la RD Congo se retrouve aujourd’hui avec un Président sortant qui se cramponne au pouvoir, un pseudo-parlement composé à 80% de fraudeurs, une constitution non respectée, une
population toujours pas recensée malgré les recommandations du dialogue intercongolais de 2002, des élections locales toujours pas organisées depuis bien avant 2002, un sénat bientôt fin mandat
sans relève, faute d’élections provinciales dans les délais. Bref, un état désarticulé.
À l’horizon, le blocage, pour ne pas dire l’ingouvernabilité, pire : le
règne de l’arbitraire.
La racine du mal ? La volonté d’un Président sortant scotché au siège
présidentiel contre vents et marées.
Une cure politique d’éléphant s’impose désormais. Tous les scénarii politiques
devraient être envisagés dans les plus brefs délais afin de respecter la volonté du souverain primaire.
Un recensement de la population, et des élections générales endéans six mois par
exemple.
Dans la constitution, en cas de vacance de pouvoir à la tête du pays, les délais
d’organisation des élections ne sont-ils pas plus courts ?
Laisser l’imposture perdurer serait non seulement une insulte à tous les
Congolais, mais aussi la voie vers une crise politique majeure, à l’issue imprévisible.
Face à ce qui vient de se passer en France, la RD Congo affiche aujourd’hui un
profil très bas.
Une véritable claque a été administrée par la France à ceux qui chez nous
prétendent être des « excellences » et des « honorables ».
Un sursaut national s’impose pour corriger la dérive.
Cheik Fita
Bruxelles, le 23 avril 2012
L'affiche du second tour